AVC : Comment prévenir l'épuisement des aidants proches ?
Jessica Hendrickx, psychologue à l'H.U.B, et Géraldine Decrolière, assistante sociale à l'H.U.B, accompagnent au quotidien les aidants proches des patients ayant fait un AVC. Elles racontent ce qu'ils/elles vivent… et comment les aider à éviter l’épuisement. Lire la suite
AVC : quand l’aidant devient le héros invisible
Comment éviter de s’épuiser ?
On ne parle pas assez d’eux. De celles et ceux qui, du jour au lendemain, voient leur vie basculer parce qu’un proche a fait un AVC. De ceux qui prennent les rendez-vous, refont l’organisation familiale, tiennent debout alors que tout s’écroule.
Ce sont les aidants proches, ces héros du quotidien que l’on voit peu — mais qui portent beaucoup.
Jessica Hendrickx, psychologue, et Géraldine Decrolière, assistante sociale, les accompagnent chaque jour. Elles racontent ce que vivent les aidants… et comment leur éviter l’épuisement.
Un bouleversement du jour au lendemain
« Un AVC change une personne. Et cela change toute la famille », explique Géraldine.
Motricité modifiée, difficultés de compréhension, troubles du langage, émotions instables… L’aidant doit souvent réapprendre à vivre avec un proche qui ne réagit plus comme avant.
La charge est immense :
- Organisation des soins,
- Surveillance quasi permanente,
- Aménagement du domicile,
- Gestion de la fatigue du patient,
- Chocs émotionnels répétés.
Et pendant que chacun se concentre sur le malade, l’aidant, lui, s’oublie.
Pourquoi les aidants s’épuisent-ils ?
Ce n’est pas seulement la fatigue physique des transferts, des toilettes ou des repas. C’est aussi :
- La peur d’un nouvel AVC,
- La tristesse de voir le proche changer,
- La frustration de journées imprévisibles,
- L’isolement social,
- Le manque de répit,
- La pression de “bien faire”.
« Le bien-être de l’aidant suit souvent celui du patient. S’il va mal, l’aidant s’écroule aussi », note Jessica Hendrickx. Beaucoup ne se rendent pas compte qu’ils s’épuisent… jusqu’à ce que le corps lâche.
Comment reconnaître les signes d’épuisement ?
Dans le corps
- Fatigue qui ne passe pas,
- Mauvaises nuits,
- Douleurs, migraines, maladies à répétition.
Dans le cœur et la tête
- Irritabilité, anxiété,
- Pleurs plus fréquents,
- Perte de motivation,
- Culpabilité,
- Perte de confiance en soi.
Dans le quotidien
- Isolement,
- Moins d’intérêt pour ce qui faisait plaisir,
- Difficulté à réfléchir ou se concentrer,
- Consommation d’alcool/tabac qui augmente,
- Sentiment de ne plus “être soi”.
Géraldine ajoute : « Quand l’aidant refuse toute aide, c’est parfois déjà le signe qu’il est trop fatigué. »
Des solutions existent — vraiment
Aucune famille n’est censée porter cela seule. Voici ce qui peut aider :
1. Parler, dire ce que l’on ressent
Avec le proche, avec l’équipe soignante, avec un psychologue. Les émotions enfouies épuisent davantage.
2. Connaître ses limites
“Non” est un mot protecteur. On ne peut pas tout faire, et c’est normal.
3. Demander de l’aide — et l’accepter
Famille, amis, voisins… Beaucoup veulent aider, mais ne savent pas comment.
4. S’entourer de professionnels
Aides ménagères, infirmiers à domicile, aidants familiaux, coordinateurs de soins.
5. Aménager le logement
Barres d’appui, aides techniques, fauteuils adaptés : ces petits gestes soulagent énormément.
6. Garder un espace pour soi
Une heure par semaine, une activité, un moment à soi : ce n’est pas du luxe, c’est vital.
7. Participer à un groupe de parole
Savoir que d’autres vivent la même chose change tout. On se sent moins seul.
8. Consulter un psychologue
Des consultations de première ligne sont accessibles à tarif réduit. Quelques séances peuvent déjà vraiment aider à retrouver un équilibre.
À quelles aides avez-vous droit ?
- ASBL Aidants Proches : informations, ateliers, groupes de soutien.
- Services d’aide et de soins à domicile : aide familiale, infirmières, ergonomes.
- Centres de jour : accueil du patient une ou plusieurs journées par semaine pour offrir du répit.
- Équipes mobiles spécialisées : accompagnement à domicile, conseils, adaptations.
- Psychologues : via plateformes et mutuelles, avec remboursement partiel.
- CPAS et mutuelles : aides financières selon les situations.
Même si les services sont parfois saturés, demander reste essentiel : chaque soutien compte.
Vous n’êtes pas seul. Et vous avez le droit d’être aidé.
Être aidant n’est pas un rôle qu’on choisit. C’est un acte d’amour. Mais aimer ne signifie pas s’oublier.
« Pour bien aider quelqu’un, il faut aller bien soi-même », rappelle Jessica.
Aux aidants :
- Vous êtes importants
- Vous êtes légitimes
- Vous méritez du soutien
- Vous faites déjà plus que vous ne croyez
À tous les autres : un message, un repas, une présence, un relais peuvent changer la vie d’un aidant.